Lucie Guillerminet : “Notre rôle de communicant est de nous adapter aux changements relationnels entre les humains”.

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Lucie Guillerminet est vice-présidente Marketing au sein de Match Group, un secteur intimement lié aux mutations sociales. Membre cette année du jury des Trophées de la Com Sud-Ouest, elle revient sur son parcours et nous livre une vision sensible de la communication d’aujourd’hui.

Racontez-nous votre parcours dans l’univers de la communication…

J’ai rejoint le marketing dès le début de mes études en intégrant une école de commerce à Lille. Très vite, je me suis intéressée à la compréhension du consommateur, aux marques et à leurs stratégies de positionnement. Pendant mon cursus, j’ai fait un échange universitaire en Argentine, puis un stage à Kuala Lumpur dans une agence d’événementiel et de RP. J’ai su alors que je voulais évoluer dans la communication, mais je ne me sentais pas encore légitime. A mon retour en France, j’ai donc rejoint  SKEMA (anciennement ESCL), pour un Master en Stratégie de Communication.

Pourquoi Meetic ?

Après plusieurs expériences en agences, créatives et médias, puis chez Budweiser, j’ai eu envie d’un secteur plus aligné avec mes valeurs personnelles, notamment les relations humaines. Il y a aujourd’hui un véritable changement sociétal autour du lien amoureux, et Meetic, en tant que pionnier du secteur, est au cœur de cette révolution. Je voulais ainsi contribuer à cette réflexion.

Voyez-vous des différences majeures entre la façon dont les individus communiquaient il y a 15 ans et les mœurs d’aujourd’hui ?

Complètement. Meetic était déjà là, à une époque où les réseaux sociaux existaient à peine. En ligne comme dans la vie réelle, les relations humaines ont profondément évolué : davantage de divorces, déconstruction du modèle familial… Des mutations qui se sont accélérées et ont gagné en visibilité avec Facebook, Instagram… Notre rôle de communicant est donc de comprendre ces changements relationnels et de nous adapter. Autant vous dire que c’est un sujet passionnant. Il y a une image que j’aime utiliser, celle de mes grands-parents. Ils se sont rencontrés à 17 ans au bal de leur village, qui avait lieu chaque samedi soir. C’était le lieu où les couples se formaient. De nos jours, les célibataires se font plus nombreux, vivent dans de grandes agglomérations, à des rythmes différents. Notre rôle est de recréer de manière dématérialisée ce fameux bal de village.

Notre rôle de communicant est de nous adapter aux changements relationnels entre les humains”.

Quel type de communication développez-vous en réponse à ces enjeux ?

Sur notre positionnement, nous sommes clairs : Meetic s’adresse aux personnes en recherche de relations sérieuses. On ne peut pas empêcher quelqu’un de mentir sur son profil, mais on peut aider les autres à décoder les comportements, à poser les bonnes questions. On essaie de prendre cette responsabilité en allant comprendre ces comportements et en communiquant dessus. Nous avons créé le Dating Lab, l’observatoire des rencontres amoureuses. Il rassemble des experts pluridisciplinaires (neuropsychologue, sexologue, sociologue…) pour écouter, analyser, questionner et confronter les tendances autour de la rencontre. Nous menons également de nombreuses études pour nourrir nos réflexions et éviter les biais personnels. C’est essentiel : chacun a un avis sur les applis de rencontre, mais ce n’est pas suffisant pour construire une stratégie. Il faut des insights solides.

Vos campagnes s’inscrivent dans cette logique ?

Oui. L’une des dernières en date porte d’ailleurs la tagline « Suis ton cœur, pas tes critères ». Dans cette même logique, nous avons développé dans toute la France les soirées Speak Easy, et sorti un coffret de questions. L’objectif : encourager l’introspection et mieux formuler ses attentes. Nous sommes convaincus que cette approche est la bonne, et le succès de ces campagnes le prouve.

Parlons maintenant des Trophées. Est-ce la première fois que vous participez à un jury de ce type ?

Oui. J’ai participé à des jurys internes ou en école, mais jamais pour un événement de cette ampleur. J’ai hâte, d’autant plus que je crois beaucoup à l’humain et aux rencontres. Il y a une telle richesse à observer le travail des autres, à participer aux réflexions actuelles sur la communication et le marketing… Il faut continuellement se challenger dans ses croyances et ses pratiques. Les Trophées sont en cela une incroyable vitrine sur de nombreux sujets, et permettent d’avoir de manière structurée des cas, des problématiques et des réponses concrètes. Et c’est un honneur en même temps qu’un challenge d’avoir été approchée pour évaluer ces réponses.

Vous allez siéger dans la catégorie Identité de marque. Qu’est-ce que cela vous évoque ?

Je crois au destin : je suis justement en train de retravailler l’identité de deux marques dans mon portefeuille. C’est un exercice difficile qui touche aux racines profondes d’une marque, et qui exige d’aligner tout le monde sur cet objectif. Ce sera passionnant de voir comment d’autres y sont parvenus.

Quelle empreinte souhaiteriez-vous que cette édition des Trophées laisse ?

Je la souhaite la plus enrichissante possible pour toutes les parties prenantes. Bien sûr, sur le plan pragmatique, à travers la qualité des cas, des analyses et des retours qui seront faits. Mais aussi sur le plan humain : grâce aux rencontres, à la fierté des équipes qui présenteront leurs projets, et à celle des lauréats. Pour moi, c’est essentiel d’être passionné par son métier, d’être fier de ce qu’on fait et des contributions qu’on apporte. Alors pouvoir partager tout cela avec une communauté de communicants et de marketeurs, c’est une incroyable opportunité. Et ce, tant dans l’échange, la reconnaissance que la gratification.

Si vous deviez créer une nouvelle catégorie, laquelle serait-ce ?

Je la lierais à l’intelligence artificielle, et à son utilisation en tant que communicant, d’autant que j’évolue dans l’univers des pure players et de la tech. Il y a là un levier de créativité énorme, mais qui doit répondre à des questions éthiques majeures. Le sujet est encore jeune et en même temps tellement vaste. Comme à l’époque de la data avant le RGPD, il manque aujourd’hui un cadre clair. En attendant que la régulation s’installe, chaque entreprise doit définir ses propres limites. Chez Meetic, nous faisons prudemment des premiers tests pour découvrir les possibilités tout en respectant nos valeurs d’authenticité. Cela reste un débat passionnant qui sera voué à évoluer, selon l’évolution du marché et de la direction de notre groupe.

[Citation : « Il y a aujourd’hui un véritable changement sociétal autour du lien amoureux. »]

 

Entretien réalisé par Fanny Carré